Pour en revenir à mon questionnement sur les plans-séquence… En fait, je crois que la question que l'on se pose (en tout cas, que je me pose) lors d'un tel visionnage est la suivante : "est-ce vraiment qu'un seul plan?" ou plutôt "y a-t-il tricherie, ce plan est-il simulé?". Ce qui me fascine est qu'on n'est jamais sûr de la réponse. Car tout de même, rappelons qu'un plan-séquence implique une absolue maîtrise du temps et du mouvement, une parfaite concordance (nous y reviendrons).
Dans Still Orang-Outans, je crois avoir perçu la coupure, la pause de la caméra. Si je crois l’avoir perçu, c’est que je n’en ai pas la certitude, en tout cas du côté du mouvement de la caméra. Ce qui me met la puce à l’oreille est la question du temps, car la première moitié du film se déroule le jour, et que soudainement, au sortir d’un personnage, il fait nuit dehors. Ma vision offre alors une preuve irréfutable, mais ma perception, elle, cherche en vain à se remémorer le mouvement qui pourrait expliquer le bris. Si l’on me demande si je l’ai perçu, je me dois de dire oui, ayant eu la preuve du bris dans le temps. Mais l’ais-je vraiment perçu , au niveau du mouvement? L’ais-je plutôt imaginé, ou vu ? Ainsi, je me demande : notre perception concorde-t-elle avec la réalité ? La dépasse-t-elle ? La devance-t-elle ?
Tuesday, November 4, 2008
Subscribe to:
Post Comments (Atom)
1 comment:
Catherine, je crois qu'il s'agit là d'un très bon questionnement. Lorsque je m'interroge au sujet d'une interprétation quelconque, je me surprends chaque fois à penser au Mépris de Godard. La citation d’André Bazin présentée à la fin du générique d’ouverture suggère que le cinéma soustrait à notre regard un monde s’accordant à nos désirs. C’est la question que Godard pose tout au long de ce film. Le cinéma doit-il s’accorder aux désirs des producteurs avides d’argent, à ceux du réalisateur suivant ses instincts ou à ceux du public ? Paul voudrait croire en l’interprétation de L’Odyssée selon laquelle Pénélope est infidèle à Ulysse puisque cela lui permettrait de croire en l’infidélité de Camille et d’expliquer la raison de son mépris. Prokosch croit en cette même interprétation puisqu’il désire que Camille soit infidèle à Paul. Camille et Lang demeurent fidèles à une interprétation plus traditionnelle puisqu’ils n’ont aucune raison de croire en l’adultère. Godard n’offre pas de réponse précise à ce questionnement. Chacun retire ce qu’il veut d’une œuvre d’art et le public saura toujours en extraire ce dont il a besoin. Je crois que notre perception fonctionne d’une manière similaire. Que ce soit fait de façon consciente ou non, notre cerveau retire ce qu’il désire percevoir. Il effectue un tri parmi les images qu’il capte. Ainsi, peut-être n’as-tu pas perçu la coupe parce que tu désirais inconsciemment voir un plan continu, mais l’évolution du récit te permet maintenant de douter de ta vision.
Post a Comment