Dans Mille Plateaux, Deleuze et Guattari donnent l’exemple du rhizome pour établir une conception non-hiérarchique dans laquelle on entre par n’importe quel côté et où chaque point se connecte à n’importe quel autre. Fidèle à ce concept rhizomique, le temps chez Deleuze est d’abord doté d’une ouverture infinie. Dans le cas du cinéma, par exemple, le temps n’est donc pas soumis au montage, mais ressort directement de l’image à travers le plan. Ce qui signifie qu’à l’intérieur même d’un plan se retrouve déjà un passé et un futur où les limites avec le présent seront toujours assez floues pour qu’en l’image soit contenue toute la structure qui d’elle en découle, tel les fractals.
« Ce que nous appelons normalité, c’est l’existence de centres : centre de révolution du mouvement même, d’équilibre des forces, de gravité des mobiles, et d’observation pour un spectateur capable de connaître ou de percevoir le mobile, et d’assigner le mouvement. Un mouvement qui se dérobe au centrage, d’une manière ou d’une autre, est comme tel anormal, aberrant. (…) Or, le mouvement aberrant remet en question le statut du temps comme représentation indirecte ou nombre du mouvement, puisqu’il échappe aux rapports de nombre. Mais, loin que le temps lui-même en soit ébranlé, il y trouve plutôt l’occasion de surgir directement, et de secouer sa subordination par rapport au mouvement, de renverser cette subordination. Inversement, donc, une présentation directe du temps n’implique pas l’arrêt du mouvement, mais plutôt la promotion du mouvement aberrant. »
Gilles Deleuze, L’image-temps, Les Éditions de Minuit, 1985, p. 53.
No comments:
Post a Comment